Cela fait partie des secrets les mieux gardés de la finance, ils ne sont jamais écrits, ni par courrier, ni par émail, ni sur un bout de papier car cela ferait office de preuve et donc engagerait l'employeur.
Qui ?
Il faut être "bonusable" cad être au front office pour faire partie de l'enveloppe de P&L (profit and loss=bénéfices) à se partager. Il faut être dans l'entreprise au moment du paiement. C'est pour cela que nombre d'intervenants annoncent leur départ le lendemain du paiement. C'est le grand jeu des chaises musicales post-bonus : le mercato.
Quand ?
Ils sont payés annuellement, semestriellement ou trimestriellement (principalement chez les brokers pour ce dernier cas).
Comment ?
Ils sont payés en cash mais depuis 2007 la politique des entreprises change et le paiement s'effectue partiellement en action, en stock options, en actions gratuites, en partie payable de façon différée. Parfois jusqu'à 5 ans suivant les résultats de l'entreprise du desk ou de la banque.
Parfois la taille du bonus est à formule, c'est à dire un % du bénéfice ou du chiffre d'affaire du desk...souvent le cas des brokers. C'est très recherché.
Pour du personnel sensible (risque de démission, gros projet,...) on peut attribuer un bonus garanti c'est à dire fixer contractuellement par avance pour une année.
Combien ?
C'est le grand écart, cela dépend de l'entreprise, de votre ancienneté, de votre position (aka loyauté) et de votre "indispensabilité" dans l'entreprise.
- Goldman est le champion toute catégorie, en 2010 le bonus moyen était de 500 000$ (379k€) par employé...ce qui va de la secrétaire au membres du board. Donc l'écart type est gigantesque.
- Bank of America le bonus moyen en 2010 était de 400 000$ (303k€).
- Chez JP Morgan le bonus moyen est passé de 354 000$ à 300 000$ (227k€) en 2011.
- Barclays a vu son bonus moyen coupé de 30% également affichant un montant de 101 000$ (76.5k€) cette année
- Pour la première fois cette année les bonus sont cappés chez Morgan Stanley à 125 000$ (95k€) (donc la moyenne sera plus basse).
Globalement les bonus vont vivre pour la seconde année consécutive une baisse de 20% à 30% en moyenne et atteignent des niveaux nominaux historiquement bas. Ils baisseront de 44% chez SG, 40% chez BNP et Crédit Agricole, 34% chez Natixis.
Ce qui suit n'est pas exhaustif et ca ne différencie pas les banques de details (BNP/SG...) des pures banques d'afffaires (GS/Morgan Stanley...) mais c'est interessant (on fait avec les infos qu'on a). Voici le montant payé au titre des charges de personnels (pour l'ensemble de chaque banque, données provenant du bilan comptable) par employé (par coquetterie je vous ai rajouté Goldman Sachs en 2006 et Lehman avant qu'il fasse faillite) :
Les beaux coups
Dans ma carrière j'ai vu 2 fois un bonus de plus 10 millions de dollar distribué à une personne, principalement pour des bonus à formule sur des stratégies ou fonds très rentables cette année là.
Mais au delà des queues de distributions extrêmes à droite >1 million de dollar, le plancher reste 0$ ou 0€. Et cette année les banques ne vont pas hésiter.
Mon avis
Si je devais émettre un avis sur ces chiffres, c'est que la finance a, depuis 40 ans, pompé tous les cerveaux les plus brillants des meilleurs écoles (ingénieurs et commerces) et universités à gros coup de dollars. Peu de personnes résistent (tout le monde a un prix).
Prenons un exemple concret (échantillon pas spécialement représentatif). De mon groupe d'amis matheux normaliens, ils sont 5 :
- une est responsable de la recherche en salle de marché à New York
- un autre fait du trading Haute Fréquence à New York
- un troisième est chez Google
- un quatrième est dans une banque en France à un poste de direction
- le dernier....est chercheur.
On peut jouer au même exercice avec les polytechniciens mais ça serait encore plus gênant pour la logique économique.
Je ne suis pas persuadé que le chercheur produise moins de valeur que les 4 autres,je pense même qu'il en produit beaucoup plus, il est simplement payé l'équivalent de 2 SMIC...
Je ne trouve pas cela foncièrement sain dans une économie. Par exemple comment réguler des produits, des modèles ou des montages que les "pauvres" salariés du régulateurs vont mettre un ou deux ans à comprendre ? (si ils comprennent).
En structuration juridique et fiscale les meilleurs "avocats/juristes" sont en banques et l'on sait qu'un montage de defiscalisation mettra minimum 2 ans avant qu'une administration fiscale commence à détecter et comprendre le montage. Cela fait parti des stratégies de structuration.
Finalement, c'est comme si vous demandiez à 2 marathoniens (bons) amateurs de concourir contre les qualifiés pour les équipes des Jeux Olympiques. Ils vont faire de leur mieux mais ça ne sera probablement pas suffisant. C'est exactement ce qui se passe actuellement dans le monde de la finance.La suite ...
Donc cette vague de baisse des salaires et de plans de départs volontaires va avoir un effet particulièrement bénéfique sur l'économie tout simplement en re-injectant de la matière grise dans l'économie non bancaire. Ce qu'essaient de dire à l'unisson mais maladroitement tous les candidats à la présidentielle (et je les rejoins la dessus) c'est que l'avenir de l'économie francaise n'est pas dans la finance mais dans l'innovation industrielle et technologique.
Et c'est bien ce qui nous sortira de la crise, une nouvelle idée industrielle, ou un nouveau facebook ou un futur google...en gestation quelque part dans un cerveau brillant...espérons juste que ce cerveau ne soit déjà plus banquier...
Et c'est bien ce qui nous sortira de la crise, une nouvelle idée industrielle, ou un nouveau facebook ou un futur google...en gestation quelque part dans un cerveau brillant...espérons juste que ce cerveau ne soit déjà plus banquier...
Signé : Eric (banquier)
message a caractère personnel: avec mon ami chercheur (sus mentionné) nous montons une start-up à nos heures perdues. Nous recherchons un business développeur (commercial) donc si par exemple un vendeur en salle de marché à tendance geek veut nous rejoindre dans une entreprise innovante et enthousiasmante, vous êtes le bienvenu. eric.valatini(a)gmail.com


Vous parlez de bonus moyen ? J'avais en tête les mêmes chiffres, mais pour des bonus médians.
RépondreSupprimerVotre dernière remarque sur le fait que l'érosion de l'attractivité bancaire est bonne pour l'économie est très intéressante. Peut-être pourrait-on toutefois la qualifier de d'un peu trop optimiste ? Ce ne sont pas nécessairement les esprits les plus brillants (d'un point de vue analytique) qui font les plus belles réussites.
Je vous souhaite bon courage pour votre start-up, c'est très honorable de votre part et redore le blason des banquiers. Auriez-vous quelque chose à vous faire pardonner ? ;)
Une petite réflexion : si facebook avait été français, il n'aurait pas été tout court. La CNIL aurait interdit - voire considérablement ralenti - un tel fichage. Mais aux US, pas de CNIL. Loin de moi l'idée de jeter l'opprobe sur cette respectable institution, mais il faut se rendre à l'évidence : la déreglementation est un levier de l'économie, à la manière des Seychelles ou de l'ile Maurice ...
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